IV - Céladopole
Chapitre 21 - Un nouvel espoir
Céladopole. District Industriel.
Après qu’Ember ait grillé notre couverture, nous sommes parvenus à convaincre les enfants de rentrer chez eux, puis avons décidé d'accompagner Erika jusque chez elle.
Heureusement, aucun d’entre eux n’a posé de questions.
“Hum…Emily ? Tu ne rentres pas avec ta soeur ?”
“Ma soeur ? J’ai une soeur ?”
Ember se tourne vers moi en posant sa question.
Parfois, j’aimerais que cette gamine soit un peu plus perspicace…
“Elle doit parler de ton amie, Sabrina.”
“Mais c’est pas ma soeur… Si ?”
“Jusqu’aux dernières nouvelles : non.”
Erika semble perdue dans ses pensées, puis s’exclame soudainement :
“Attends, sérieux ?! Je vous traite comme si vous étiez des jumelles depuis le début et personne ne m’a rien dit !!”
Comment lui en vouloir… C’est vrai que les deux filles se ressemblent pas mal.
Même couleurs de cheveux, mêmes couleurs d’yeux, à peu près la même corpulence.
Je ne connais pas cette Sabrina, personnellement, mais pour l’avoir déjà vu, je confirme que son apparence peut sembler troublante.
“En tout cas, c’est vraiment cool que tu sois venu me sauver A.. Abdul !”
Un peu tard pour le pseudonyme… Mais je salue l’effort.
“En plus t’as pas cassé la moto cette fois !!”
“Tu dis ça comme si je la cassais à chaque fois !!!”
La jeune fille détourne le regard, un air gêné se dessinant sur son visage.
Elle abuse… On a eu quelques problèmes de pièces à remplacer de temps à autre, mais jamais le véhicule n’a été “cassé”.
Pendant ce temps, je peux sentir le regard d’Erika s’intensifier à notre égard.
J’imagine qu’elle doit avoir un milliard de questions à me poser…
Cela fait un moment que nous marchons maintenant.
Nous avons déjà pris deux lignes de métro différentes ainsi qu’un bus pour rejoindre le District Industriel.
Quelque chose cloche…
Connaissant la famille d’Erika, elle devrait soit vivre dans un endroit luxueux, soit au dortoir de son académie.
Je ferais mieux de rester sur mes gardes.
“Voilà, j’habite ici. Vous voulez monter ?”
E.. Elle vit vraiment dans un hangar…
“Elle est bizarre ta maison… Mais elle à l’air super grande !”
“C’est en grande partie un hangar, mais il y a une zone à l’étage qui est aménagée, donc c’est comme un studio !! Suivez-moi.”
Une sorte de loft, hein ?
Je commence à déplier la béquille latérale de la moto quand soudain…
La roue arrière du véhicule se détache, commençant à se faire la malle à travers la rue qui, j’ai oublié de le préciser plus tôt, est en réalité une énorme pente.
“Ouah ! Je n’avais pas vu l’heure… Si tu veux, tu peux dormir dans ma chambre, Emily.”
“Ça va, je me suis déjà couchée plus tard que ça.”
-répond Ember, se goinfrant de biscuits gracieusement offerts par notre hôte.
“Ah ! Mais peut-être que Erika n’a pas l’habitude, A.. bdul ! On devrait peut-être la laisser tranquille…”
“ N.. Ne t’en fais pas pour moi. J’ai fait une sieste plus tôt dans la journée. Je pensais rester debout toute la nuit de toute façon… Haha.”
Et ça m’arrange.
Dans tous les cas, je n’avais aucunement l’intention de partir.
Les événements de ce soir ont donné naissance à deux problèmes : le fait que ma couverture soit compromise, et le comportement étrange du drone.
Pour ce qui est de la boule ambulante, je me suis empressé de lancer une analyse en arrivant.
Je ne suis pas un expert, mais j’ai un peu d'expérience à force de faire de la maintenance, que ce soit pour l’Eevolv, ou lors de mes missions pour la Team Rocket.
En attendant les résultats, occupons-nous du cas d’Erika.
“Au fait… Pourquoi tu ne retires pas ton casque ?”
“Hah ?”
“Ça fait un moment que tu n’es plus sur ta moto. À moins que tu ne sois un de ces super sentai…”
“HAHAHA !!! Azul, arrête de faire ton enfant et retire ton casque !!”
Est-ce que c’est la gamine qui se prend pour une magical girl qui se moque de moi actuellement…? Elle s’est remise à m’appeler par mon vrai prénom d’ailleurs…
Bref, elle a raison, ça ne sert à rien d’avoir peur de montrer mon visage. Foutu pour foutu.
Je retire alors mon casque, le posant sur la table basse.
…
“Ah…”
“Hm ? Erika ? Qu’est-ce que tu-”
La jeune fille se rapproche de moi, passant doucement ses doigts dans mes cheveux, avant de laisser ses mains glisser le long de mon visage.
“E.. ERIKA ?!! J.. JE COMPRENDS CE QUE TU RESSENS, MAIS AIE UN PEU DE RETENU, JEUNE FILLE !!!”
Ember se jette sur nous pour nous séparer en hurlant.
Merci… J’étais complètement paralysé par la gêne.
“Tu lui ressembles tellement… Azul.”
…!
“Hein ?! A.. Avant que tu ne te trompes à nouveau, Azul n’a pas de frère jumeau !!! Je crois…”
“Oh ! Non, il n’en a pas ! Haha…”
Erika…
“Comment tu peux en être aussi sûre ?! V.. Vous-vous connaissiez déjà ?”
“Nous sommes cousins.”
Au cœur de Johto, dans une ville connue sous le nom d’Enju City, se trouve l’un des clans les plus puissants du pays… Si ce n’est du monde.
Intégralement constitué de femmes, le clan se spécialise dans tous les secteurs, des arts martiaux aux sciences, de la politique à la musique.
Aussi loin que l’histoire se souvienne, ce clan a toujours été là, au cœur d’Enju City.
Accueillant des jeunes orphelines à travers le monde, les éduquant et les transformant en prodiges, avant de les marier à des hommes capables de faire usage de leurs talents.
Il est dit que le clan ne portait aucun nom autrefois, les gens à travers le monde les appelait donc : les femmes en kimono.
Finalement, ce nom est resté, et nous les appelons le Clan Kimono, en référence à leurs vêtements.
Erika fait également partie de ce clan.
Depuis son plus jeune âge, la jeune fille enchaîne les allers-retours entre Johto et Kanto.
Car tel sera son rôle lorsqu’elle sera adulte : Servir de pont entre ce pays et son clan.
Cela explique également pourquoi elle étudie actuellement à Céladopole.
“Attends ! Mais du coup Azul ressemble à qui exactement ?”
“Sa mère : dame Hitomi.”
Le regard d’Ember se tourne alors vers moi.
Ahh… Je n’aime pas ce regard…
Le regard d’un enfant perdu, se demandant comment elle devrait réagir.
Je ferais mieux de changer de sujet.
“On aurait probablement dû commencer par là, mais, Erika, je vais devoir te demander de garder le secret vis-à-vis de moi et Emily.”
“Garder le secret…? A.. Azul… Ne me dis pas que-”
“Arrête de prendre des raccourcis aussi glauques et malsains que ton état mental, espèce de dégénérée.”
“ H.. HAH ?!”
Après avoir expliqué la situation à notre hôte, celle-ci accepte de ne rien dire à personne, mais nous devons accepter certaines conditions…
“Je veux vos contacts à tous les deux. Et votre adresse aussi. Ah, et je veux aussi être mise au courant s’il se passe quoi que ce soit ! Et aussi-”
“Un instant ! Le contact à la limite, je peux comprendre, mais je ne vois pas trop où tu essaies d’en venir avec le reste.”
Un sourire doux se dessine sur les lèvres de la jeune fille, qui semblait à peine tenir sur place.
“Tout le monde te pensait mort, Azul… Lorsque j’ai vu un avis de recherche avec ton nom dessus, il y a quelques mois, j’ai tout fait pour en apprendre plus.”
…
“J’ai essayé de contacter le dojo, mais personne ne répondait. Je me suis alors tournée vers le clan, mais c’était comme si à leurs yeux le sujet ne me concernait pas.”
Je ne trouve pas les mots, et décide donc de laisser Erika poursuivre son discours.
“Je t’ai déjà perdu deux fois. Alors cette fois-ci, je ne te lâcherai plus !”
Ses mots résonnent en moi.
Pourquoi ?
Ces idiots continuent, encore et encore, de m’imposer leurs sentiments.
Des images du passé parcourent mon esprit.
Le visage bienveillant de ma mère.
Le sourire réconfortant de Green.
La couleur rouge.
L’odeur et le goût du métal, cette texture liquide qui sèche rapidement au contact de la peau.
Le sang de mes proches sur mes mains.
Mon propre sang, se déversant des plaies causées par ce que je pensais être mon meilleur ami.
Erika a souffert de son côté, mais elle ne sait pas ce que c’est de faire face à l’horreur.
Je lève mon regard vers elle, son expression me laisse deviner qu’elle est encore sur son petit nuage.
Désolé, Erika…
“Je ne suis pas revenu pour vous.”
Son sourire se décompose lentement.
“Les avis de recherche, la famille qui est en silence radio. Tu aurais dû comprendre le message plus tôt, Erika. Je n’ai plus aucun lien avec vous. Je ne suis plus la personne que tu connaissais. Azul Leeves est mort il y a deux ans.”
“Qu’est-ce que tu racontes…?”
“Tu m’as fait part de tes sentiments, alors je te partage les miens également. À mes yeux, tu n’es rien de plus qu’une inconn-”
Avant que je ne puisse finir ma phrase, je vois Ember me foncer dessus afin de me gifler.
J’intercepte sa main à temps, mais la gamine tente alors de me frapper avec son autre main (que je maîtrise également).
“À quoi tu joues là ?”
“TAIS-TOI !!!”
Ayant les deux mains bloquées par les miennes, la jeune fille décide alors de faire usage de sa tête… Littéralement.
BAM—
“AAAAAAAAIE !!!”
Après que j’aie lâché ses mains, Ember se recroqueville en se tenant le front, tremblant de douleur.
“Je ne sais pas ce que tu voulais faire, mais on avait une conversation sérieuse là, donc…”
“Pourquoi tu ne ressens rien ?!”
“Si ça peut te rassurer, j’ai bien ressenti l’impact de ton front sur le mien…”
“JE PARLE PAS DE ÇA, IDIOT !!!”
Hah ?
Erika court auprès d’elle afin de voir si elle va bien.
“Calme-toi, Emily…”
“T.. Tu étais censé arrêter de te comporter comme un méchant… Je sais pas c’est quoi votre histoire à tous les deux, mais Erika est vraiment gentille ! Et tu lui as beaucoup manqué !!”
…
Je comprends ce que tu essaies de me dire, Ember…
Mais ne t’inquiètes pas, les mots de Léo à Azuria sont encore ancrés en moi.
Biiiiiiiiiip—
Le timing est parfait.
L'analyse du drone est enfin terminée.
Je fais alors mine d’ignorer les deux jeunes filles, laissant Erika s’occuper du front de ma partenaire tandis que je vérifie les données.
“Ah…”
“Q.. Qu’y a-t-il ?”
“Erika. Tu as dit que tu avais perdu ce drone en l’emmenant avec toi à l’Académie. Mais où l'as-tu eut à la base ?”
“Il était dans l’appartement lorsque j’ai emménagé… Je pensais que c’était ce genre de robot qui fait la lessive et la cuisine.”
Je vois mal comment une boule peut aider à faire le ménage, mais ok…
“Tu peux m’en dire plus à son sujet ?”
“Hmm… D’habitude, il me suffit de prononcer son nom suivi d’un ordre afin qu’il l'exécute. Genre : Iris, met un réveil à six heures, ou Iris, quel temps fait-il aujourd’hui ?”
Iris… ? Si c’est une blague, alors elle est de très mauvais goût.
“Nous verrons plus tard pour changer son nom… Qui était l’ancien locataire ?”
“Changer son..?! Hum… J’ai entendu dire que ce hangar était utilisé par le Professeur Chen au début de la guerre.”
“Chen… C’était pas comme ça que s'appelait papi grincheux ?!”
Sérieux… Ça commence à faire un peu trop de coïncidences d’un coup.
Mais ça expliquerait pourquoi l’analyse de ce fichu drone est aussi étrange.
Les données précédant sa rencontre avec Erika sont totalement incompréhensibles, comme si le code même de la machine ne répondait à aucune logique. De même pour les données correspondantes à la période où il était à l’École Marguerite.
S’il s’agit bien d’une création du professeur, alors celui-ci a créé un langage unique juste pour cette boule. Mais dans quel but ?
“Tu as trouvé d’autres machines comme celle-ci dans le hangar ?”
“E.. En fait…”
Erika se déplace jusqu’à un grillage, qui semble séparer l’étage habitable du loft avec le vide, donnant directement sur le reste du hangar.
En appuyant sur un interrupteur, soudain, toutes les lumières de l’étage inférieur s’allument, couvrant ce qui était autrefois un vide obscur.
Je décide alors de la rejoindre avec Ember, mais nous ne nous attendions pas à ce qui allait suivre.
“C’est…!”
“L’Eevolv !!!”
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