IX - Final
Chapitre 72 - Père et fils
Il pleuvait ce jour-là.
Une pluie torrentielle. Comme si le monde souhaitait désespérément se laver de ses péchés. Comme si les cieux pleuraient, eux aussi, la perte d'une femme formidable. Comme si nos sentiments s'étaient réunis pour prendre une forme physique.
Je n'ai jamais aimé Hitomi comme un homme devrait aimer son épouse. Je n'ai jamais compris ce que ressentaient les gens qui tombent amoureux. Cependant, cette femme avec qui je partageais ma vie, la mère de mon fils, était quand même une des personnes les plus précieuses à mes yeux.
Depuis notre enfance, nous passions notre temps à nous chamailler pour la moindre chose. Elle était énervante mais drôle. Stupide mais sage. Égoïste mais affectueuse. Repoussante et belle à la fois.
Hitomi était une anomalie. Incompréhensible. Turbulente. Une menace au calme et à la normalité du quotidien.
Elle prenait beaucoup trop de place dans la maison, dans ma tête, dans mon cœur… et dans ma vie.
Sa perte m'a fait beaucoup plus mal que ce que j'aurais pu imaginer. Et ça, c'est sans parler de son clan d'origine, qui nous a tourné le dos, nous reprochant sa mort alors que nous n'avions aucun contrôle sur la situation.
Dans ce contexte abominable, celui qui en a le plus souffert ne fut pas moi, mais notre fils, Azul.
Il a vu sa mère s'éteindre sous ses yeux, alors qu'il n'avait que neuf ans. La scène était violente et sanglante. Les médecins et les psychiatres qui l'ont vu ont dit qu'il était en état de choc, et que son cerveau refusait sûrement d'accepter ce qu'il s'était passé comme étant la réalité. C'est pour cette raison qu'il ne versa aucune larme le jour de son enterrement.
Tout le monde savait que le petit souffrait en silence. Qu'il était le premier à s'en vouloir. Que ce soit pour la perte de sa mère, ou pour son incapacité à pleurer.
Nul ne savait comment le consoler. Rien ne fonctionnait. C'était comme s'il était déconnecté du monde. Je lui ai donc donné la seule chose qui l'intéressait encore. De la force.
Je l'ai entraîné plus durement que n'importe quel autre disciple. Je lui ai donné les armes pour affronter ce monde cruel. Et lui ai transmis les valeurs nécessaires pour qu'il ne se perde jamais dans l'obscurité.
J'ai élevé mon fils du mieux que je le pouvais, jusqu'au jour où il était temps pour lui de faire entendre son nom au monde.
À ses dix-huit ans, Azul partit servir Kanto pour la guerre qui opposait ce pays à son voisin, Johto.
Il ne repassera plus jamais le seuil de la porte après cela.
À la fin de la guerre, lorsque Kanto l'emporta et annexa Johto, tous les jeunes soldats rentrèrent chez eux. Certains avec fierté, d'autres avec honte. Mais tout ce qui comptait pour leurs parents, c'était de les revoir enfin. En vie.
Un luxe auquel je n'ai pas eu le droit, puisque mon fils a rencontré la mort lors de la bataille finale.
J'étais dévasté. Plus rien n'avait de sens. J'avais perdu ma femme, mon amie, ma confidente, et donc notre relation historique avec le clan Kimono. Et maintenant, j'ai perdu mon fils, mon trésor, mon espoir, et mon seul et unique héritier.
Je me pensais mieux que mon père. Plus fort. Plus juste. Sauf que je suis devenu celui qui allait mettre fin à l'existence de notre dojo, après plusieurs générations.
Pendant des mois, j'ai refusé d'ouvrir les portes de notre maison aux visiteurs. Peu importe qu'ils soient des administratifs, des disciples, des anciens amis. J'étais plongé dans les ténèbres et, pour la première fois de ma vie, j'avais peur de retrouver la lumière écrasante du jour.
"Eh bien, ça pour une surprise… Je ne pensais pas un jour vous voir dans un tel état," sifflais une femme aux cheveux rougeâtres, s'étant apparemment introduit chez moi par effraction.
"Olga...?"
Mes yeux étaient maintenant plus qu'habitués à l'obscurité. J'étais encore assis contre le mur de la cuisine, observant la table à manger, qui était autrefois un lieu de réunion pour notre famille.
"La seule et l'unique," répondit-elle en s'allumant une cigarette, tirant une chaise pour s'y asseoir.
"Que fais-tu ici…? Le dojo est fermé…"
"Je suis venu voir une personne au fond du gouffre. C'est un de mes nombreux passe-temps."
"...Tu as toujours été une petite insolente," je commente en ne prenant pas la peine de la regarder.
Le silence était lourd. Le moindre bruit, comme les vrombissements du frigo, ou les crépitements de sa clope, résonnaient dans ma tête. Je souhaitais qu'elle parte. Qu'elle me laisse seul.
"Azul a respecté le code d'honneur du dojo jusqu'à la fin. C'est ce que ses camarades ont dit lorsque je leur ai parlé de lui," dit-elle en soupirant une épaisse fumée blanche.
"...Je vois."
Mon fils est resté digne jusqu'au bout. Il ne s'est pas laissé influencer par la folie de ce monde. J'étais fier de lui. Un sourire se dessinait sur mes lèvres… mais malgré tout ça, des larmes commençaient à couler.
Au fond de moi, une graine s'était semée. Une graine d'ombre. Quelque chose qui ne devrait pas exister dans mon esprit. Un doute vis-à-vis de mes croyances.
J'aurais préféré qu'il prenne la vie d'autrui, si cela lui aurait permis de revenir auprès de moi...
Finalement, après cette visite de mon ancienne disciple, j'ai décidé de rouvrir le dojo. Ce ne fut pas facile, mais c'était mon devoir en tant que survivant. Je devais vivre pour ceux qui n'étaient plus là.
Et puis, deux ans plus tard…
Des affiches avec le visage et le nom de mon fils faisaient le tour du pays. Ce dernier était recherché pour crime de foi.
C'est ridicule…! Azul n'aurait jamais fait une telle chose !! Il est un héro qui a sauvé de nombreuses vies lors de la guerre, pas un idiot jouant les dieux !!!
De toute manière, cette histoire ne faisait aucun sens. La personne décrite comme étant mon fils semblait avoir des pouvoirs dignes des légendes qui circulaient à propos des alliances noirs du clan Kimono.
Sans parler du fait qu'Azul est mort depuis longtemps maintenant…
Si c'était évident pour moi, le monde ne l'entendait pas de cette oreille. Que ce soient les journalistes qui me harcelaient à longueur de journée, ou encore la Ligue, qui envoya un membre de son prestigieux Conseil afin de m'imposer un Ultimatum.
"Rejoindre le Conseil ? Rien que ça ?" Je demandais, sur le ton du sarcasme.
"Le Maître est intéressé par votre profil depuis longtemps. Il ne vous l'a simplement jamais proposé, car il connaissait la réponse en avance," me dit Olga, toujours une clope au bec.
"S'il connaît la réponse, pourquoi demande-t-il maintenant ?"
"Parce que vous ne pouvez plus refuser désormais," annonce-t-elle calmement, comme si ce qu'elle venait de dire n'était pas le début d'une menace. "Suites aux événements récents à Carmin sur Mer, il serait logique que la Ligue saisisse ce dojo, et vous mette sous surveillance en attendant qu'Azul Leeves ne vienne vous voir."
"Ce type n'est pas mon fils… Tu le sais aussi bien que moi ! Azul est—"
"Mort ? Franchement, ce monde est tellement étrange parfois que ça ne me surprendrais pas que des morts se baladent dans nos rues."
J'avais l'habitude de gérer son insolence. Après tout, lorsqu'Olga a rejoint notre dojo, elle avait le même âge et la même aura sombre que lorsque Giovanni est arrivé de Céladopole.
Heureusement, contrairement à mon père qui, à l'époque, a nourri la nature obscure de son disciple, j'ai montré à Olga la lumière qui brillait en elle.
C'est pour cela qu'elle n'a pas trop mal tournée. Bien que j'ignore ce qu'elle fait au sein du gouvernement…
"De vous à moi, vous devriez accepter ce deal les yeux fermés," ajoute-t-elle en finissant sa cigarette, l'écrasant sous son talon.
"Ha ?"
"Vous aurez une meilleure vision sur l'affaire depuis la Ligue. Et un meilleur contrôle de la situation, si les choses dégénèrent."
Une fois de plus, les mots d'Olga étaient calculés afin de me convaincre, m'occultant une grande partie de son plan, tout en me laissant juste assez de pistes pour deviner ce qu'il se passait dans son esprit.
"Qu'est-ce qu'il attend de moi, exactement ? Ton Maître."
Le visage de mon ancienne disciple se déforma dans une expression mêlant l'indignité et le dégoût. Je suppose qu'elle n'est pas totalement soumise à son organisation.
"Vous aurez le titre d'Instructeur. Votre rôle sera de former les soldats de demain. Et, accessoirement, de participer à des réunions barbantes dans une pièce remplie de personnes à l'ego surdimensionné."
Ça ne changeait donc pas de mon rôle dans le dojo. Je pouvais en apprendre plus sur la personne usurpant l'identité de mon fils, tout en influençant les jeunes qui rejoignent cette organisation douteuse qui est la Ligue.
J'ai donc accepté le deal.
En quelques mois, j'ai pu convaincre un petit groupe d'étudiants à rejoindre les idéaux du dojo. Mais surtout, j'ai pu réunir suffisamment d'informations afin de rencontrer ce type, et confirmer qu'il n'est qu'un imposteur.
Lentement, je reprends mon souffle. Une mince fumée blanche se dispersant dans l'air chaque fois que j'expire.
J'avais la situation sous contrôle. Malgré mon désavantage flagrant face à mon père et ses disciples, j'ai doucement renversé la tendance. Il ne me restait plus qu'à neutraliser les trois étudiants restants. Cependant, quelqu'un m'a coupé l'herbe sous le pied au dernier moment…
Koga Fuschia, l'ancien chef du village caché de Parmanie, observe désormais son ancien rival d'un œil autoritaire. Un regard partagé par ce dernier.
![[Vert Feuille] Mechamon Iris - Page 7 Chapit71](https://i.servimg.com/u/f66/18/58/83/29/chapit71.jpg)
"J'ai entendu dire que ton clan avait rejoint la Résistance. Saches que je ne suis pas venu pour interférer avec vos plans," affirme Bruno en brisant le silence pesant qui s'était installé depuis une longue minute désormais.
"Quoi ? Tu as peur que je m'immisce dans vos affaires de familles ?" Demande Koga, ne prenant pas la peine d'expliquer à son vieil ami qu'il n'était plus associé au clan Fuschia.
"Ce n'est pas ce que tu es en train de faire…?" Rétorque mon père en fronçant les sourcils.
Un sourire se dessine sur les lèvres du ninja, qui pose alors son pied sur l'un des disciples au sol.
"Je suis venu m'assurer que personne n'intervienne dans votre petite réunion père-fils, justement."
"Cet homme n'est pas mon fils," répond Bruno Leeves d'une voix hostile.
De nouveau, un long silence se propage dans le tunnel. Koga observe mon père, sans l'ombre d'une expression sur son visage. Finalement, il me regarde moi. Ses traits se durcissant alors qu'il réalise ce qu'il se passe.
"Tu es un idiot pas fini, Bruno. Cet homme est—"
D'un geste du bras, je fais signe à Koga pour qu'il se taise. Et, enfin, je prends la parole.
"Les mots ne suffiront pas à le convaincre," mon regard rencontre alors celui de mon père, qui ne m'offre rien de plus que de la froideur. "Et de toute façon, je n'ai pas le temps d'expliquer mon parcours à un type en pleine crise de la quarantaine."
"Dans ce cas, je vous laisse terminer ce que vous avez commencés," soupire le ninja en croisant les bras. J'ignore ce qu'il est réellement venu faire ici, mais le fait est qu'il ne semble pas vouloir interférer plus que ça dans notre combat.
De nouveau, la tension monte entre moi et mon père. Je range mon arme, prenant une des nombreuses postures de combats qui m'ont été enseignés lors de mon enfance.
"Je l'admets, tu es fort… Mais cette force a été acquise dans les ténèbres, afin de servir à des actes criminels odieux. Je ne te laisserais pas traîner le nom de mon fils dans la boue plus longtemps !"
"Tu parles trop !! Bats toi !!!" Sur ces mots, je me lance en direction de mon père.
Ce dernier emploie une posture défensive, se préparant à répondre à mon attaque. Qu'il en soit ainsi !
Concentrant toute ma force dans une seule main, je tente de lui asséner un puissant coup de poing. Mais Bruno m'intercepte en plaçant ses paumes en face de lui.
L'onde de choc nous force tous les deux à reculer. Nous avons alors la même idée. Celle de profiter de la distance et du Momentum pour utiliser le style de la feuille-morte, enchaînant des coups rapides tout en parant ceux de l'adversaire.
Aucun de nous deux n'arrive à prendre le dessus sur l'autre. C'est le problème lorsqu'on joue trop franc jeu contre quelqu'un qui connaît exactement les mêmes techniques que soi.
Mais je décide quand même de rester sur cette voie pour le moment, reculant de deux bonds en arrière avant de courir autour de lui, sans le lâcher du regard.
Bruno n'attend pas longtemps pour tenter de me tacler, sauf que j'en profite pour bondir dans les airs au même moment.
Là, mon père se redresse rapidement pour tenter de me faire un uppercut à l'atterrissage. Lisant en lui comme dans un livre ouvert, j'utilise ma veste afin de piéger son poing à l'intérieur, et, profitant du fait qu'une partie de mes bras sont encore prisonniers de mes manches, je le contourne sans toucher le sol.
De nouveau, j'utilise l'élan afin de concentrer toute ma force dans mon genou. Cette fois-ci, il n'a pas le temps d'employer le style du bourgeon. Son visage rencontre mon coup comme un mimigal rencontre le journal du dimanche matin enroulé par un arachnophobe.
Mon adversaire serre les dents, une quantité folle de sang sortant de son nez tandis qu'il se saisit de ma veste. Je tente de la retirer rapidement, mais son autre main attrape mon poignet à la sortie.
Dans un mouvement rotatif digne d'un balbuto dans un dessin animé johtonnais, mon père me fait tourner dans les airs avant de m'écraser contre le sol.
Le coup est d'une brutalité inouïe. L'air quitte mes poumons à une vitesse folle, au point de les rendre si douloureux que le simple fait de respirer me procure un sentiment de regret intense.
Avec le souffle coupé, mon temps de réaction risque d'être grandement réduit. Mais ce n'est pas grave. J'ai vraisemblablement atteint mon objectif.
Le poing de mon père, suspendu au-dessus de mon visage, tremble. Son regard est incertain. Si je veux pouvoir l'atteindre, c'est maintenant ou jamais.
"Nous avions l'habitude de nous battre de la sorte, peu de temps avant que je parte…"
"...!"
Son expression change progressivement. Il est vulnérable. Quelque chose d'indescriptible, entre la tristesse et le bonheur, brille dans ses yeux.
"Au final, je n'ai jamais réussi à te vaincre… Mais chaque défaite m'apportait une précieuse leçon," j'ajoute en souriant.
"T.. Tu ne m'auras pas—"
"Je suis en vie, père."
Sur ces mots, nous nous fixons longuement. Son poing perdant de plus en plus de force, jusqu'à tomber le long de son corps. Je décide donc de poursuivre.
"Je suis désolé de ne pas être venu te voir plus tôt… Je me suis posé beaucoup de questions. Je me suis perdu, et je me suis trouvé. Je suis tombé et je me suis relevé. Ce fut long... Mais la personne que je suis devenue, aujourd'hui, est enfin prête à te faire face."
"A... Azul…"
"Et aussi," je passe mon bras derrière lui, pour le serrer contre moi, sauf qu'au dernier moment… "Tu as perdu."
Sans qu'il ne le remarque, j'avais dégainé mon revolver. Je me suis arrangé pour que nous soyons placés juste en dessous d'une lampe, fragilisée par un de mes tirs précédents.
Son regard s'écarquille, mais il est trop tard. En un coup de feu, l'objet servant normalement à illuminer une portion du tunnel tombe sur lui.
Ce ne sera pas assez pour le tuer (heureusement) mais, dans son état actuel, ce sera plus qu'assez pour le mettre K.O.
Rampant au sol, je m'extirpe de sous le corps de mon père. Je ne suis pas un monstre, donc je prends quand même le temps d'éloigner l'objet l'aillant assommé. Et aussi de repositionner son corps de sorte à ce que son réveil se fasse en douceur…
"Je suis bien content de ne pas t'avoir comme fils…" Commente Koga, regardant l'état actuel de son ami avec beaucoup d'indulgence.
"Parce que vous pensez qu'Anzu vous accueillera plus chaleureusement, lorsque le moment sera venu ?" Je rétorque, l'observant d'un œil peu affectueux.
Une crise de toux envahit le ninja, qui détourne le regard de honte. Cela me fait penser… Il est drôlement expressif comparé à la fois où je l'ai rencontré, à Parmanie.
"Vous ne vous cachez pas derrière une marionnette aujourd'hui ?" Je lui demande, attirant de nouveau son attention.
"Tu as l'œil," dit-il en se rapprochant du corps inconscient de Bruno. "Je voulais parler à ton père de choses importantes. C'est toujours mieux de le faire en face-à-face."
Non seulement, il est venu sans ses marionnettes, mais il est seul en plus de ça. Il est probablement devenu plus fort depuis la dernière fois. Mais surtout…
"En vue du timing, je doute que vous soyez là juste pour parler à un ami," je commence à théoriser, son regard impitoyable se posant de nouveau sur moi. "Si vous êtes venu seul, c'est parce que vos hommes surveillent la région actuellement, n'est-ce pas ? Vous vous apprêtez à jouer un rôle dans la bataille à venir."
Koga reste silencieux. Ses yeux sombres me fixant comme s'ils attendaient le moment où je dirais le mot de trop pour m'attaquer.
Il n'est pas là pour aider la Résistance. Ni la Ligue. La mobilisation du clan Kimono du côté des johtonnais confirme presque ma théorie.
Ce vieux fou a l'intention de profiter du chaos pour mener à bien sa vengeance personnelle. Quitte à se condamner lui-même.
En temps normal, je devrais le stopper. Pour Anzu, Erika, et mes amis de la Rébellion. Mais aussi, car cet idiot serait capable de convaincre mon père de l'aider. Cependant, j'ignore quel est sa force actuelle. Et je suis affaibli.
Ma priorité, immédiatement, est de rejoindre Ember et les autres. Le reste passe en second plan.
"J'ai d'autres chats à fouetter, de toute façon. Je suppose qu'on peut se dire au revoir ?" Je propose en récupérant mon deuxième flingue au sol.
"On peut faire ça, oui," répond Koga en fermant les yeux, relâchant enfin la pression monstrueuse qu'il tentait de me mettre depuis un moment, maintenant.
Après avoir récupéré toutes mes affaires éparpillées un peu partout, je me tourne une dernière fois vers Koga et Bruno, demandant au ninja de transmettre un message à mon père, avant de repartir en direction de Jadielle.
Alors que mes pas résonnent dans le long couloir souterrain, je prends peu à peu conscience d'une chose. L'humanité est une espèce formidable.
Être apte à créer des véhicules mécaniques capables de transporter plusieurs personnes d'un point A à un point B à une vitesse pouvant monter, légalement, selon les routes, à cent trente kilomètres/heure… C'est merveilleux.
C'est ce qui nous a fait regarder nos cartes sous un autre œil. Soudainement, un objectif se trouvant à cinq kilomètres pouvait être considéré comme proche. Et pourtant…
Un très long soupire s'extirpa de mes lèvres, alors que je maudissais mon père pour m'avoir privé de mon automobile.
"Je n'aurais pas dû retenir mes coups…"
Marchant comme un con en direction de mon point de départ, je sens le vent me balayer le visage au passage d'une moto à côté de moi.
C'est drôle, c'est le premier véhicule que je croise depuis que je suis entré dans ce putain de tunnel.
Maintenant que j'y pense, la circulation est censée être contrôlée des deux cotés par le clan Fuschia, pour éviter une mauvaise surprise juste avant la bataille au Plateau Indigo.
Le fait que Koga ait réussi à s'infiltrer sans être repéré n'a rien de surprenant, mais comment est-ce que mon père et ses étudiants ont fais ? Si nos alliés les avaient vus, ils nous auraient au moins prévenus…
"Peut-être aurais-je dû attendre qu'il se réveille pour l'interroger… Bien que je doute qu'il m'aurait répondu."
De nouveau, le son d'un moteur se rapproche, dans le sens opposé cette fois. Il s'agit de la même moto, qui ralentit de plus en plus jusqu'à s'arrêter à mes côtés.
"Azul ?! Qu'est-ce que tu fais là ?!!"
Je me tourne en direction du deux-roues, constatant avec joie que le véhicule est en réalité composé de trois roux.
"Je n'ai jamais été aussi heureux de te voir," je commente en souriant. "...Léo."
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